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mercredi 27 avril 2016

L’Autriche, mauvaise élève ou avant-gardiste ?

 
 


Le 27/04/2016


La victoire d’une force populiste prouve l’inadéquation de la réponse des dirigeants aux problématiques qui taraudent les citoyens.


L’an 2000 avait commencé par son « bug démocratique » : Jörg Haider, le gouverneur de Carinthie, le personnage aux amis sulfureux, l’idéologue ethnocentré, le sex symbol au teint hâlé, venait d’arriver au pouvoir dans cette Autriche aux paysages montagneux et à la culture multiséculaire.
 Pour Wolfgang Schüssel (ÖVP, parti démocrate-chrétien), associer le FPÖ (Parti de la liberté d’Autriche) aux affaires était la meilleure manière de contrecarrer l’extrême droite.
L’Union européenne ne l’entendit pas de cette oreille et infligea rapidement sa batterie de sanctions au pays frondeur de l’Europe centrale, comme elle aurait hésité à le faire à l’encontre d’un État du Moyen-Orient peu acquis aux droits de l’homme.
Elles furent rapidement levées.
Un ministre belge bien en cour avait même recommandé à ses compatriotes, au nom de la morale, de ne plus aller skier en Autriche.
Pour la plupart des hommes politiques et des commentateurs, les nazis avaient fait leur soudaine et fracassante réapparition en plein cœur d’un continent dont l’idéal kantien du jus cosmopolitum devait écarter tout risque de retour de la barbarie.
Fatalement, des camps de concentration finiraient par resurgir des terres autrichiennes, les étrangers devraient reporter l’étoile et les libertés seraient bafouées.
Pourtant, rien de ce qui fut annoncé au nom du catastrophisme n’eut lieu.
Comme dans toute démocratie parlementaire, la vie politique autrichienne y est allée de ses soubresauts, avec ses flux et reflux du populisme honni, ses reprises en main par les forces politiques traditionnelles, avant leur embourbement dans une gestion marécageuse.
Le FPÖ, parti de Jörg Haider, a quant à lui quitté le gouvernement avec fracas en 2002, avec la démission de la vice-chancelière Suzanne Riess-Passer, est revenu aux affaires affaibli par les élections, a connu le départ de son chef emblématique, parti créer l’Alliance pour l’avenir de l’Autriche (BZÖ) avec quelques affidés, et a connu une palingénésie, concrétisée par le résultat de ce week-end.
Entre-temps, Jörg Haider est décédé, au volant de sa voiture.
L’Histoire repasse aujourd’hui les plats.
Norbert Hofer, propre sur lui, est la nouvelle figure de proue.
Le fracas est moindre.
L’Union européenne s’est habituée à ses populistes.

Le politologue autrichien Reinhard Heinisch, de l’université de Salzbourg, ville de Mozart et de Karajan, analyse le succès du FPÖ dédiabolisé par la concomitance de trois facteurs : la crise des réfugiés, le sentiment d’abandon des citoyens et la campagne inadaptée des formations traditionnelles.
 En d’autres termes, un grand classique de la politique européenne actuelle.
Que l’on s’en réjouisse, ou non, la victoire d’une force populiste en Europe prouve une nouvelle fois l’inadéquation de la réponse apportée par les dirigeants européens aux problématiques qui taraudent les citoyens, notamment sur la question identitaire dont l’Autriche est à l’avant-garde.


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